//// Rashomon ////


Rashomon - 1950
 

L'affiche italienne du film - Cliquez sur l'image pour l'agrandir (76 Ko)


Réalisation et montage : Akira Kurosawa.
Scénario : Akira Kurosawa, Shinobu Hashimoto, d'après deux nouvelles de Ryunosuke Atugawaka, Le portique de Rasho (Rashomon, 1915) et Dans les fourrés (Yabu no naka, 1921)
Directeur de la photographie : Kazuo Miyagawa (35 mm ; 1,33 ; noir et blanc)
Musique : Fumio Hayasaka, avec une variation sur le Boléro de Ravel.
Producteurs : Masaichi Nagata, Jingo Minura
Société de production et de distribution : Daiei

Interprétation :
Toshiro Mifune (le bandit Tajomaru)
Machiko Kyo (Masage, la femme)
Masayuki Mori (le samouraï Takehiro Kanazawa, son mari)
Takashi Shimura (le bûcheron)
Minoru Chiaki (le prêtre)
Kichikiro Ueda (le passant)

Durée : 1h28
Prix : Lion d'or au festival de Venise, Oscar du meilleur film étranger à Hollywood.

Le film se déroule durant l'ère Heian (IX°-XII° siècles), période de troubles et de guerres civiles. Sous le portique de Rasho ("Rashomon"), trois hommes, qui s'abritent de la pluie diluvienne, vont se mettre à discuter pour passer le temps: un bûcheron, un prêtre et un passant venu les rejoindre. Les deux premiers ont été témoins d'un évenement qui les fait encore frissonner quelques jours après: le corps d'un samouraï a été retrouvé mort, tué vraisemblablement par le bandit Tajomaru (Toshiro Mifune, encore une fois exceptionnel).
On va assister en fait à quatre témoignages, tous sensiblement différents, sur le déroulement de l'affaire: tout d'abord celui du bandit, puis celui de la femme du samouraï tué, qui était présente (et qui était même l'enjeu principal de la lutte). Dans une scène magnifique, un médium invoquera l'esprit du samouraï mort, qui racontera sa propre version des faits. Enfin, le bûcheron, seul témoin indirect de l'affaire, donnera la version qu'il considère comme la seule objective (il avait déclaré lors du procès n'avoir pas vu la scène, mais seulement découvert le corps).
Les intêrets divergents des trois protagonistes principaux de l'affaire (le bandit, la femme, le samouraï) provoquent des récits complètements différents suivant chacun, qui cherche toujours à se donner le meilleur rôle possible. C'est au spectateur de choisir ce qu'il veut croire, le réalisateur ne cédant pas à la tentation de transformer l'histoire en film policier ("comment cela s'est-il réellement passé?")
Le "choeur idéal" (Aldo Tassone) qui discute sous le portique, est entièrement chamboulé par cette histoire: le prêtre, confronté à la dure réalité du mensonge, perd la foi en l'être humain... Mais Kurosawa ne veut pas laisser le spectateur sur une impression trop noire de l'humanité, et rajoute une fin qui sonne comme un répit (et non pas comme un "happy end" mielleux): le bûcheron, qui entend les cris d'un enfant abandonné, décide de l'adopter. Le prêtre idéaliste le remercie: "Ton geste a restitué ma foi en l'humanité"...

Dans ce film, le premier qui a fait connaître Kurosawa en Occident, grâce au Lion d'Or obtenu à Venise, le réalisateur se garde de tout jugement de valeur et n'énonce pas des vérités (on ne saura jamais comment s'est réellement passée la scène dans tous ses détails, même si la version du bûcheron est sans doute la moins éloignée des faits).
La maîtrise technique de Kurosawa (certains plans sont des monuments de cinéma, et le montage, effectué par le réalisateur lui-même, possède un rythme rarement atteint) appuie encore plus le propos du film: la nature humaine est complexe, faite de contradictions: chacun détient sa vérité et la considère comme seule valable...