//// La légende du grand judo ////


Sugata Sanshiro - 1943
 

L'affiche originale du film - Cliquez sur l'image pour l'agrandir (126 Ko)


Scénario et réalisation : Akira Kurosawa, d'après le roman homonyme de Tsuneo Tomita, biographie romancée de Sanshiro Sugata.
Directeur de la photographie : Akira Mimura (35 mm ; 1,33 ; noir et blanc)
Musique : Seiichi Suzuki
Producteur : Keiji Matsuzaki
Société de production et de distribution : Toho

Interprétation :
Susumu Fujita (Sanshiro Sugata)
Denjiro Okochi (Shogoro Yano, maître de judo, école Shodokan)
Takashi Shimura (Hansuke Murai, maître de jiu-jitsu, école Ryoi-Shinto)
Yukiko Todoroki (Sayo/Otomi Murai, sa fille)
Ryonosuke Tsukigata (Higaki Gennosuke, maître de jiu-jitsu)

Durée : 1h40, réduit à 1h20

En 1883 à Tokyo (soit après 15 années d'ouverture au monde dans l'ère Meiji), un jeune disciple souhaite s'initier à l'art ancestral du jiu-jitsu. Les membres de sa nouvelle école décident de donner une leçon de combat au créateur d'un nouvel art martial, très mal perçu : le judo. Dans une scène de combat à tendance impressionniste (sur un quai très mal éclairé, on aperçoit juste des silhouettes en train de combattre), le maître de judo, Shogoro Yano, donne une leçon aux représentants de la vieille école.
La décision de Sugata Sanshiro est alors prise : il choisit de rejoindre le camp de la nouvelle école (dans une scène magnifique où on le voit jetant ses sandales, qui sont emportées doucement par la pluie).
L'élève va rapidement se montrer très doué, et va même dépasser son maître. Il a pourtant un gros défaut, qui peut l'empêcher de devenir le meilleur : il est impulsif et irréfléchi, ce qui va jusqu'à provoquer la désolation de son maître. Dans une scène magnifique, Sugata Sanshiro, pour lui prouver son affectation va se jeter dans la mare proche de la maison de ce dernier, et rester toute la nuit accroché à un tronc d'arbre.
Ce rite initiatique va le rendre plus fort et surtout beaucoup plus posé : lorsqu'il sort de l'eau, c'est un autre homme, prêt à affronter ses adversaires : les tenants de l'école du jiu-jitsu, qui veulent leur revanche.
Cependant, un élément nouveau entre dans la vie de Sugata : il tombe amoureux de la fille de son prochain adversaire : Murai. Après avoir défait ce dernier, il croit être arrivé au bout de ses peines, d'autant plus que son vaincu le prend en affection et accepte de lui donner la main de sa fille.
Tout irait bien si le meilleur disciple de Murai, Higaki, exigeait une revanche, un duel à mort. Cette dernière scène de combat est sûrement l'une des plus belles que Kurosawa ait jamais tourné : dans les hautes herbes de la campagne nippone, dans une atmosphère apocalyptique (le vent est déchaîné), on assiste à un corps à corps somptueux.
Même si le film n'est pas égal dans toute sa longueur, et que quelques scènes manquent un peu de profondeur, on y retrouve des éléments qui feront la force de Kurosawa : une technique picturale parfaitement au point, une maîtrise parfaite du montage, une très bonne direction d'acteurs, des éléments oniriques (la fleur de lotus que Sugata regarde dans la mare, le dernier combat…). Certaines scènes sont des purs moments de plaisir cinématographique : le combat du début, la nuit dans la mare, le combat final...
Le maître Yasujiro Ozu ne s'y est pas trompé : devant la commission de censure, il déclare : « Si 100 est la note maximale, Sugata Sanshiro mérite 120 ! Félicitations, Kurosawa ! »
Le film se taille un immense succès au Japon, malgré les coupures de la censure (les militaristes attendaient d'un tel sujet un traitement plus viril et exaltant, alors que Sugata semble complètement vidé après une victoire, désireux de s'excuser). La carrière de « l'empereur » est alors lancée et n'est pas prête de s'arrêter !